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LE DADDY DU MOIS: François d’EpenouxFrançois d'Epenoux a traversé toutes les vies du papa moderne. Trois fois papa à trente ans, puis papa séparé (ou papa du dimanche comme il les appelle dans son livre de 2012) et une nouvelle expérience paternelle quinze ans plus tard.
Sur leur fiche de présentation à la rentrée, à l'école, ils mettent quoi tes enfants à « profession du père » ? Ils mettent publicitaire et écrivain je crois. Et s'ils veulent se la péter un peu, ils mettent écrivain et scénariste
Au moment où je les ai pris dans mes bras. C'est à ce moment que je me suis senti investi d'un poids au sens propre comme au sens figuré. Sentir leur chaleur contre moi. C'est cette sensation très enveloppante de porter le corps comme la mère l'a porté. Oscar commence à être costaud et je me dis que je dois profiter de pouvoir encore le porter. Ou alors, je le ferai mais je me casserai le dos et je marcherai comme un petit vieux.
Une sacrée différence même. On se sent beaucoup plus zen. On connaît. Ce n'est pas le même bouleversement, et en même temps, il y a une forme d'angoisse parce qu'on se projette vers l'avenir et qu'il paraît beaucoup plus long à 25 qu'à 45 ans. Plus incertain aussi.
J'ai une femme qui est énormément investie. Donc, je lui laisse gérer au jour le jour l'organisation. Elle fait les choix, je suis un peu en retrait. Je lui donne à manger, mais c'est ma femme qui choisit les petites carottes qui vont bien. Mais on a nos rites avec Oscar. On adore jouer à la bagarre. Il descend au garage avec moi. Par contre, la piscine c'est avec sa mère.
J'aime les histoires de famille. C'est très inspirant.
On doit faire la bascule entre les deux. Il faut écrire avec ses tripes. Et ensuite, passer du très personnel au très universel. Je n'écris pas des romans, mais des récits. Je raconte vraiment ce que je vis.
J'ai moins l'angoisse de la mort depuis que je suis père. J'ai plus le sentiment d'un cycle. Ce n'est pas ma propre vie qui va s'achever. J'ai plus le sentiment d'être un maillon de la chaîne qu'une entité. La fusion entre la vie et la mort est plus grande. Ce sont les deux côtés d'une même médaille. La vie est comme une course de relais, avec un vieux qui tape dans la main d'un nourrisson.
Terrifiant. Un vertige absolu. Je ne peux même pas l'articuler.
Oui, c'est une posture. J'ai arrêté ça. Arrêté de me dire : je vais me bourrer la gueule, me jeter par une fenêtre et tout le monde sera triste. Avant je prenais des postures de poètes maudits, aujourd'hui j'ai bien envie de vivre vieux.
Peut-être un mec pas trop moderne justement. Un mec qui résiste aux vents de la mode. Un mec droit dans ses convictions sans être rigide. Il y a quelque chose d'intemporel dans la paternité.
Oui, le personnage du père moderne en ce moment est insupportable. Le mec se plie à mille fonctions. Dans mon livre, Les papas du dimanche (2012), je parle de ces papas après séparation. Ceux à qui il manque toujours un truc au parc. Ils sont touchants par cette imperfection. Ils n'ont jamais de mouchoirs. Il ne faut surtout pas essayer d'être parfait.
Crapoutche. Ou Monsieur Crapoulo. J'aime bien appeler Oscar, Monsieur quelque chose.
De ne pas se prendre au sérieux. |