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ADOS : ET SI ON PARLAIT SEXE ? – N#27
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Ancien interne des hôpitaux de Paris et ex-collaborateur du Professeur Marcel Rufo, Michael Larrar est pédopsychiatre et papa de deux enfants.
Daddy Coool : Quel rôle doit-on adopter en tant que papa face à la sexualité de ses enfants ?

Michael Larrar : Un parent du même sexe serait le mieux placé des deux parents pour parler sexualité à l’enfant et à l’adolescent. Pour autant, les parents restent souvent les personnes les plus mal placées, dans la tête de l’adolescent, pour discuter de cela. C’est une mission qui est de toute façon compliquée. Si le papa est mal à l’aise ou si l’adolescent est trop gêné par cette conversation, cela peut être un oncle ou un grand-cousin , quelqu'un de confiance qui délivrera le message mais qui n’est pas aussi impliqué affectivement avec le jeune.


DC : Quelle est la bonne distance à adopter ?

ML : La distance est importante car les adolescents se sentent très vite intrusés par leurs parents. Ils ont l’impression que l’on empiète sur leur espace et que l’on veut trop en savoir. Ils sont mal à l’aise avec l’idée de la sexualité de leurs parents, même s’ils n’en ont pas conscience. C’est pour cela qu’ils ont des difficultés à parler de sexe avec leur papa : « car si mon père parle de sexe, c’est qu’il fait du sexe – et en plus il le fait avec ma mère, ce qui est insupportable ». L’ado préfère croire à l’immaculée conception, il sait mais ne veut pas savoir. En terme de distance, il ne faut donc pas se citer en exemple de sexualité. Si l’on veut partager des expériences, on peut parler des difficultés, des râteaux, des gènes… En somme, pas de sexualité mais du vécu relationnel et de l’amour propre.

DC : À quel âge faut-il parler de contraception ?

ML : Ce n’est pas une question d’âge, mais d'âge mental et de maturité de son enfant. S’il a des petits amis, s’il se virilise ou se féminise, si l’on commence à percevoir des histoires d’amour, des flirts, etc… il faut leur en parler directement. Sinon, il faut le faire avec un caractère préventif, à table et de manière conviviale, autour de sujets divers.

DC : À quel point faut-il les informer ?

ML : La problématique n’est pas là où on la croit. Les jeunes sont très informés, les papas ne doivent pas se demander s’ils connaissent le préservatif ou la pilule du lendemain. Le problème vient du manque de confiance en soi : la gène pour sortir le préservatif, pour l’imposer à l’autre… Bien qu’ils fassent semblant que non, les ados sont très mal à l’aise avec la sexualité. Quand on est très gêné, on peut rapidement oublier la contraception, ou se laisser faire par le moins gêné des deux.

DC : Comment faire face aux images pornographiques ?

ML : Encore une fois, le devoir des parents est de maintenir une certaine distance. Le rôle de filtre que cette conversation pourrait avoir est assez faible, et on prend plus de risques à être dans une proximité dérangeante qu’autre chose. Tous les ados vont voir des images pornographiques, certes. Pour autant, depuis que je suis en consultation, j’ai été témoin de l’explosion d’internet et du porno : les jeunes ont un rapport à l’amour et à la sexualité assez identique. Les fantasmes peuvent être différents, mais au moment d’acter avec son(sa) petit(e) ami(e), on retrouve les mêmes questions et les mêmes angoisses qu’il y a dix ans.

DC : Quel est le discours à tenir ?

ML : C’est pour les plus fragiles qu’il faut faire attention, comme la jeune fille mal dans sa peau qui va accepter des choses, pensant qu'ainsi elle plaira ou qui ne va pas oser demander un préservatif. À nouveau, c’est davantage la gène, le doute et la perte de confiance en soi des jeunes gens qui crée le problème – bien plus que l’ignorance. C’est un leurre de penser que c’est le manque d’information sexuelle qui crée les problématiques. En effet, c’est la peur de ne pas être à la hauteur, garçon comme fille, qui fait qu’ils ont parfois des comportements à risque. Et c’est sur cette perte de confiance qu’il faut les informer. Là, un papa peut expliquer à ses enfants qu’il a eu les mêmes doutes et les mêmes blessures, mais qu’il en a survécu. J’explique souvent lors de mes consultations : « quelqu'un de fort, ce n’est pas quelqu'un qui ne tombe pas. C’est quelqu'un qui tombe et qui se relève ».


DC : Que dire à ses enfants au sujet de la masturbation ?

ML : Il faut maintenir une distance maximale. La masturbation est quasi unanime, et taboue depuis toujours. Il faut laisser l’adolescent en parler avec ses amis. Il entend des choses suffisamment déculpabilisantes à la radio ou la télévision. En parler avec ses parents, c’est bien trop gênant.

DC : Faut-il parler d’orientation sexuelle ?

ML : L’orientation sexuelle est puissamment déterminée dans le psychisme. Dès lors, une discussion, quelle qu’elle soit, ne changera pas la
donne. Il n’y a aucune raison d’en parler avec les plus jeunes enfants :pour eux, la vie se fait avec des princes et des princesses, et l’hétérosexualité reste la norme. En réalité, la question se pose lorsque son fils ou sa fille pose la question. Un enfant a sa temporalité psychique et il faut la respecter. Celui qui pose une question est prêt à entendre la réponse ; celui qui ne pose pas de question, c’est soit que ca ne l’intéresse pas, soit qu’il n’est pas prêt à entendre la réponse. S’il pose une question sur le mariage homosexuel, il faut expliquer les faits et précisant que cela reste rare. Encore une fois, le plus important est de respecter la temporalité des enfants. On ne fait pas de prévention psychique – on répond aux questions que l’enfant peut se poser, et nous poser.
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